Médias sociaux et influenceurs, un heureux casse-tête
Retour à la liste des articlesEntrée écrite par : Mikaël Morrissette
Depuis l’émergence de la théorie du two step flow sur l’influence personnelle proposée par Katz et Lazarsfeld, la notion d’influenceur s’est grandement développée, notamment avec le foisonnement des médias sociaux. Pour Heiderich et Maroun (2014), les leaders d’opinion sur les réseaux sociaux sont des internautes apportant du contenu à valeur ajoutée sur un enjeu donné dont ils se réclament avoir les compétences. Amplification de la portée d’un message, augmentation de la crédibilité d’une campagne, sentiment de confiance envers l’organisation, les avantages à recourir à un influenceur lors d’une campagne sur les réseaux sociaux fourmillent. Mais attention, qui s’y frotte s’y pique ! Encore faut-il savoir identifier la bonne personne pour véhiculer notre message.
Typologie
Dans son ouvrage fort intéressant portant sur le marketing d’influence à l’ère du numérique, Raymond Morin identifie 5 grands types d’influenceurs à repérer dans les réseaux lors de l’élaboration d’une campagne en ligne. Diviser en deux principales catégories, cette typologie distingue les influenceurs à l’échelle macro et au niveau micro.
1) Les célébrités
La majorité des utilisateurs associe la notion d’influenceur aux célébrités. Il est en effet difficile d’ignorer les vastes auditoires fidèles que rejoignent ces personnalités. Se hiérarchisant dans la catégorie macro, Morin précise que « leur influence se mesure uniquement par l’importance de leur auditoire, et la portée de leur message » (2015 : 64). Les célébrités s’avèrent particulièrement utiles lors d’un lancement de produits, d’évènements publics de grande envergure ou encore pour endosser des causes à grande échelle.
2) Les leaders d’opinion
Initialement proposée dans un cadre politique, la notion de leader d’opinion s’étend beaucoup plus largement à l’ère des réseaux sociaux. Sur le Web, les leaders d’opinion bénéficient également d’un vaste auditoire, mais ce qui les distingue, c’est la crédibilité et l’autorité que les utilisateurs leur confèrent. « Ce qui les motive davantage, est d’augmenter leur influence, et créer une valeur ajoutée pour leur auditoire » (Ibid). Les YouTubers, les Instagramers, les influenceurs Snapchat et les blogueurs sont parmi ceux jouissant d’une grande notoriété en sol nord-américain. À long terme, une relation de confiance s’installe entre les utilisateurs et le ou la leader, d’où la pertinence pour les organisations d’y recourir.
3) Les diffuseurs
Les trois derniers types identifiés par Morin se situent davantage à l’échelle micro. Les diffuseurs s’inscrivent dans une perspective d’amplification et de diffusion massive du message, augmentant ainsi considérablement la portée de l’information. « Leurs interventions spontanées seront le plus souvent motivées par le souci de partager en premier l’information avec leur communauté » (2015 : 65). Journalistes spécialisés, chroniqueurs, professionnels ou experts d’un domaine, les diffuseurs partagent leurs avis et recommandations.
4) Les super-utilisateurs
Les super-utilisateurs se sont littéralement multipliés avec l’émergence des plateformes de partage et de recommandation. Les consommateurs s’informent de plus en plus avant de transiger avec les marques et l’e-réputation des organisations influence grandement les décisions. Ce segment est au cœur de la majorité silencieuse… qui finit toujours par se manifester et s’exprimer. « Même si, à première vue, leur réseau n’est pas aussi important que celui des autres types d’influenceurs, l’impact de leurs recommandations ne doit pas être négligé » (Ibid). Employés, partenaires, clients satisfaits ou mécontents, Morin précise que les super-utilisateurs représentent le bassin d’ambassadeurs potentiels le plus important.
5) Les influenceurs-reporters
Morin clôture sa proposition de typologie en évoquant une dernière catégorie se développant conséquemment aux nouvelles habitudes des publics. Le scepticisme croissant des consommateurs envers les sources d’informations et les relations de presse traditionnelles engendre en effet un accroissement de ce que Morin nomme les influenceurs-reporters. « Pour des lancements de nouveaux produits, ou pour une activité corporative, l’impact d’un influenceur-reporter auprès du public-cible aura souvent plus d’impact que les relations médias » (2015 : 66).
Pratique pérenne ?
Malgré tout, si le fait d’identifier les influenceurs dans une communauté est une chose, les convaincre d’agir en tant qu’ambassadeurs pour l’organisation sur les médias sociaux est une autre paire de manches. Voilà un défi intéressant pour les organisations, qui doivent se montrer davantage créatives dans leurs approches.
À la lumière des tendances observables sur les médias sociaux, de plus en plus d’organisations ont recours aux influenceurs sur ces plateformes. Avec la logique du earned media qui prévaut à celle du paid media sur les réseaux sociaux (dans Boussicaud et Dupin, 2012), il est permis de se demander si les utilisateurs accorderont encore longtemps de la crédibilité aux leaders d’opinion, sachant que certains reçoivent des compensations importantes de la part des organisations.
Sources
Boussicaud, Ronan et Antoine Dupin. 2012. Tout savoir sur … La marque face aux bad buzz : Anticiper et gérer les crises sur les médias sociaux. Éditions Kawa. 253 pages.
Heiderich, Didier et Natalie Maroun. 2014. « Relations publiques de crise : nouvelle approche structurelle de la communication en situation de crise ». Synthèse des travaux de l’Observatoire International des Crises. En ligne. URL : http://www.communication-sensible.com/download/Relations-publiques-de-crise.pdf. Consulté le 22 février 2017.
Morin, Raymond. 2015. Tout savoir sur … Génération C(onnectée) – Le marketing d’influence à l’ère numérique. Les Éditions Kawa. 117 pages.